Pratique avancée infirmière : zoom sur un nouveau métier

François et Jessica, infimiers de pratique avancée en stage

Alors que les cursus universitaires de pratique avancée infirmière ouvrent progressivement partout en France, certains IPA achèvent déjà leur formation ! C’est le cas de François Duponchelle, formé à Angers et en stage à plusieurs reprises au sein de la MSP de Landas et en lien avec la CPTS Pévèle du Douaisis. L’expérience ayant été particulièrement riche, aussi bien pour lui que pour les équipes en place, c’est une nouvelle stagiaire IPA qui a rejoint la Maison de Santé en stage il y a peu, Jessica Villette. Rencontre avec ces deux professionnels !

Pouvez-vous nous raconter votre parcours et ce qui vous a amenés vers la formation d’IPA ?

Jessica Villette : Cela fait 9 ans que je suis IDE pour l’EPSMD de l’Aisne. J’ai effectué quelques années en unité extérieure, et je suis maintenant depuis 2 ans en unité d’accueil et d’orientation. Cela faisait un moment que je m’intéressais à la fonction d’infirmière de pratique avancée. Je suivais avec attention la sortie des décrets, et j’attendais en particulier celui sur la santé mentale. Lorsqu’il est paru en 2019, le directeur des soins de mon établissement a immédiatement lancé un appel pour envoyer 2 membres du personnel en formation. J’ai postulé et ai été retenue. Aujourd’hui j’effectue ma formation en alternant 2 semaines de cours, et 2 semaines à l’EPSM. Pour mon stage, je suis ici à temps complet pour 2 mois.

François Duponchelle : Quant à moi je suis infirmier depuis 20 ans ! Je viens de l’hospitalier, j’ai travaillé une dizaine d’années dans les services de soins généraux en urgences, réanimation, en salles de réveil… J’ai ensuite fait un petit passage de 2 ans par la ville avant d’intégrer un service d’addictologie en soins externes. Je travaille aujourd’hui en CSAPA. Je suis par ailleurs titulaire d’un DU d’addictologie et d’un DU de sexologie. J’ai vu la pratique avancée comme un moyen de développer de nouvelles compétences et de gagner en autonomie dans ma pratique.

Pouvez-vous nous présenter brièvement le métier d’IPA et votre formation ?

FD : Le parcours IPA se compose d’un tronc commun en 1re année, puis de spécialités en 2e année. Il existe 4 mentions de spécialités actuellement : psychiatrie/santé mentale, néphrologie et transplantations rénales, oncologie, et enfin pathologies chroniques stabilisées et prévention des polypathologies. Une 5e mention urgences devrait peut-être ouvrir. Sur ces 2 années nous effectuons plusieurs mois de stage, leur répartition peut différer selon les universités.

JV : La formation nous prépare à assumer différents champs de compétences qui composent la fonction d’IPA :

  • Compétence clinique auprès du patient
  • Compétence de leadership (mettre des actions en place sur le versant des professionnels)
  • Compétence de recherche
  • Compétence d’expertise (relatif à la mention choisie)
  • Compétence de collaboration

Finalement, la fonction d’IPA peut revêtir de nombreuses formes. Pour beaucoup de monde, être IPA se résume à faire de la prescription de thérapeutique. Mais ça ne se limite vraiment pas à ça ! Ce n’est qu’une partie du travail, et pas forcément ce qui m’intéresse le plus par exemple.

FD : En effet, l’intérêt de l’infirmier de pratique avancée, c’est qu’il est vraiment « couteau-suisse », avec des compétences qui vont de la clinique pure, à la coordination, en passant par la recherche..

Jessica, vous qui démarrez votre cursus, qu’espérez-vous retirer de cette formation ?

JV : Ce qui m’intéresse particulièrement c’est l’analyse des pratiques professionnelles. Nous avons une UE consacrée à cela, on y aborde par exemples les styles de tutorat etc. c’est quelque chose que j’aimerais mettre en pratique dans la structure où j’exerce.

Actuellement, nous n’avons pas réellement « d’espace » pour échanger sur nos pratiques, sur les cas complexes, sur des thèmes spécifiques (par exemple gérer l’agressivité, etc.). Organiser des réunions régulièrement en pluripro pourrait permettre d’améliorer nos pratiques et nos connaissances. Et ce sont aussi les patients qui bénéficieront de tout cela.

Et pourquoi avoir choisi ce terrain de stage ? Comment avez-vous connu la Maison de Santé ?

JV : Je cherchais un terrain de stage dans la région Hauts-de-France et j’avais envie de me tourner vers une MSP. En 1re année il faut que nous fassions un stage hors mention (donc hors psy pour moi), et j’étais intéressée par les soins primaires. Au quotidien en psychiatrie, je suis un peu loin de ça et ce choix me permettait de mettre à jour mes connaissances.

En faisant mes recherches de terrain de stage, je suis tombée sur un article dans lequel François témoignait de son expérience de stage de 1re année à la MSP de Landas ! J’ai rapidement appelé Sylvain [Duriez] et il était partant pour m’accueillir.

François a contrario, vous arrivez à la fin de votre stage. Quel bilan en faites-vous ?

FD : J’ai effectué tous mes stages ici : 3 mois en 1re année, découpés en 2 stages, puis 5 mois en seconde année. Ce que je trouve intéressant dans le fait d’avoir effectué tous mes stages dans la même structure, c’est de voir l’évolution de mon degré d’autonomie. J’étais vraiment en découverte/observation lors de mon 1er stage, puis en semi-autonomie lors du second, en faisant toujours des feedback avec les médecins. Cette année j’ai accompagné en autonomie les patients adressés par les médecins de la MSP, un peu sur le même schéma que les internes en SASPAS.

On pourrait se dire que c’est une limite de faire tous ses stages au même endroit, mais à mon âge j’ai déjà vu beaucoup de lieux, beaucoup de services. J’avais vraiment envie de travailler de manière approfondie sur les soins primaires. Quant à l’exercice coordonné, on en parle à l’hôpital, mais c’est vraiment ici que je l’ai vécu et ressenti. On est sorti du cadre conceptuel pour entrer dans quelque chose de pratique et vivant. Ce n’est pas un concept idéologique, ça vit, c’est concret.

Comment voyez-vous l’avenir pour le métier d’IPA ? Qu’espérez-vous ?

FD : Je pense que le métier d’infirmier de pratique avancée peut avoir un intérêt formidable par exemple au sein d’une CPTS. On met beaucoup en avant la question de la consultation, de l’auscultation… Mais nous avons aussi des compétences en prévention des polypathologies et là je pense que nous avons un rôle clé à jouer. Nous pouvons faire du repérage de la dénutrition chez les personnes âgées, faire des bilans gérontologiques, de l’évaluation de l’anxiété, des troubles cognitifs… En ville en 1re intention nous pouvons déjà apporter énormément d’éléments aux médecins afin qu’ils puissent compléter les diagnostics.

Sur le plan personnel j’aimerais bien être en lien privilégié avec les médecins de la CPTS. Qu’ils me sollicitent pour de l’ETP, du suivi de patients chroniques stabilisés… La grosse limite que je vois aujourd’hui par rapport au métier concerne son modèle de financement. En ville, les IPA sont actuellement limités à 4 consultations par an et par patient (avec en plus une cadence trimestrielle). C’est une grosse limite à l’implantation des IPA en ville. La question est donc de trouver un modèle de financement qui permette de pérenniser cette fonction, en la rémunérant à sa juste valeur.

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